Réforme économique de la santé : et le patient dans tout cela ?
[27 juin 2008 - 09:40]
Le financement des groupes électrogènes dans les hôpitaux, la revendication des médecins hospitaliers dont le temps de travail hebdomadaire est susceptible de passer à 65 heures, la régulation des soins infirmiers… Toutes ces questions, sous une apparence exclusivement économique et sociale, en cachent d’autres qui elles, conditionnent la santé publique. Avec un patient finalement, projeté en première ligne. Explications.
La Société de Réanimation de Langue française (SRLF) a vivement réagi à l’incident de l’hôpital Saint-Antoine, survenu dans la nuit de mercredi à jeudi. Chacun a en mémoire la panne électrique qui a plongé l’établissement (800 lits) dans le noir, nécessitant l’évacuation de 5 malades en réanimation.
« En pareille situation » souligne Bertrand Guidet, président de la SRLF, « la première décision consiste à mobiliser les groupes électrogènes pour permettre aux services vitaux de l’hôpital de fonctionner. En cas de défaillance de ces systèmes, le personnel est formé à la ventilation manuelle des malades ».
Seulement voilà : « près de la moitié des services de réanimation en France, ne sont pas en situation réglementaire bien que les décrets soient applicables et opposables depuis avril 2007 », explique-t-il. Avec 5 malades évacués « par précaution », le bilan de l’incident est finalement bénin. Mais pour Bertrand Guidet, cette alerte doit être prise au sérieux.
De leur côté, les médecins de la Fédération de la Permanence de Soins hospitalière (FPSH) s’insurgent contre les mesures introduites par la révision de la Directive européenne « temps de travail » et la perspective d’une durée du temps de travail portée à… 65 heures par semaine. « Dans l’intérêt des patients, il est totalement déraisonnable de travailler après une garde », insiste le Dr Philippe Aillères de l’hôpital Saint-Joseph. « Ces horaires à rallonge ont un impact sur la vigilance et la réactivité » des professionnels les plus aguerris. Autrement dit le risque d‘erreurs, de diagnostics ou de prescription, s’élève…
Souvenons-nous d’ailleurs qu’en 2002, des chercheurs britanniques avaient montré que le simple fait de passer une nuit blanche, avait les mêmes effets qu’une alcoolémie de 0,1 gramme par litre de sang ! La sécurité du patient est donc bien en jeu. « Mais celle du médecin aussi, d’autant que nos horaires sont totalement décalés », conclut Philippe Aillères.